Chère Janine,
Aujourd’hui nous sommes le 11 septembre : vous et Michel devez être heureux car c’était la date d’anniversaire de Michel et la date de votre mariage. Vous aviez plusieurs fois choisi cette date pour de grandes occasions.
Je voudrais vous exprimer toute ma reconnaissance pour toutes ces années vécues à vos côtés. Vous avez été une épouse idéale, une mère idéale, une grand-mère et arrière-grand-mère idéale, et une belle-mère idéale ! En habitant à 50 mètres l’une de l’autre, vous n’avez jamais été envahissante !
Toujours discrète, attentionnée, vous nous avez appris la convivialité, les repas en famille, le bonne cuisine "maison". J’ai appris à cuisiner avec vous et d’autres choses encore. Quand je suis arrivée à la ferme pour la première fois, je devais avoir 12 ans. J’étais amie avec Lydie depuis la 6ème et nous montions à cheval ensemble à Epégard. Je passais à la ferme de temps en temps pour aller la voir, et un été où mes parents ne pouvaient pas nous emmener en vacances, ils vous ont demandé si je pouvais rester chez vous. Nous venions de la région parisienne, puis de Rouen, et je découvrais la campagne et la moisson. J’ai adoré venir aider, avec les autres jeunes, les cousins, les frères de Lydie, eh oui c’est comme ça que j’ai connu Denis qui est devenu mon mari. Et j’aimais préparer avec vous le repas pour la grande tablée d’une quinzaine de personnes. J’ai appris beaucoup de recettes et j’ai également appris à coudre avec vous.
Quand on a commencé à se fréquenter avec Denis, je n’avais que 16 ans et cela avait fait scandale à l’époque. Les grands-parents ne voulaient pas de cette relation et j’ai dû arrêter de venir à la ferme. Maman avait écrit une longue lettre pour expliquer qu’il n’y avait pas d’âge pour vivre un amour, et Vous, vous lui aviez répondu par quelques lignes polies, mais cela vous dépassait. Heureusement, le malaise n’avait pas duré, et nous avons enfin pu vivre notre relation avec Denis, puis l’officialiser. Ensuite, Maman a été malade et elle est partie quand j’avais 20 ans. A la ferme, c’était un peu ma deuxième maison. Nous avons même emménagé chez vous pendant 2 ans après notre mariage, avant que notre maison soit habitable.
Les enfants sont arrivés, et vous étiez heureuse de pouvoir profiter d’eux et les voir tous les jours quand ils rentraient de l’ école. Quelle patience ! Je crois que je ne vous ai jamais vue vous mettre en colère. Ils ont défilé tous les trois, tous les jours pendant des années, pour prendre le goûter et faire leurs devoirs chez vous.
Je me souviens aussi des goûters que je vous aidais à préparer pour Michel, Denis et ceux qui les aidaient à la moisson. Pendant toutes ces années, vous avez toujours été là pour leur apporter dans les champs, moi pas toujours !
Vous avez même joué dans le court-métrage de Thomas quand il était à son école d’animation. Mamie actrice !
Evidemment, les repas du mercredi midi étaient incontournables pour les enfants et pour tous ceux qui étaient libres, et même les amis qui passaient. Il y avait toujours à manger pour qui arrivait à midi. Vous aimiez trouver de nouvelles recettes et nous les faire goûter. Je pense que beaucoup ici se rappelleront de votre hospitalité avec Michel, votre générosité. Il n’y avait aucune jalousie, ni convoitise, ni jugement ou agacement, même si j’imagine que quelques fois vous deviez pester contre Michel quand il ramenait du monde à l’improviste le soir pour dîner !
Les repas de Noël se sont déroulés chez vous, dans la véranda, pendant de nombreuses années, vous décoriez toute la maison, le sapin était grandiose, la crèche toujours présente, et toute la famille se rassemblait, unie autour de vous et Michel. Nous préparions ensemble le boudin blanc aux champignons. Un délice ! Vous étiez infatigable quand il s’agissait de préparer de grands repas familiaux.
Encore une anecdote qui me vient : vous qui ne saviez pas nager, vous avez très tard décidé de prendre des cours de natation, puis vous alliez faire de l’aquagym toutes les semaines avec Monique.
Vous et Michel étiez toujours présents aux fêtes du village, chacun se souviendra de votre flan célèbre et des petites attentions que vous portiez pour décorer la salle lorsqu’il y avait des repas organisés par le comité des fêtes ou la mairie.
Vous étiez discrète mais décidée. Vous ne vous plaigniez jamais, pourtant vous aviez des douleurs. C’est vous qui vouliez vous faire opérer du dos car vous souffriez trop. Les médecins n’étaient pas trop pour, mais vous avez insisté. Puis, pareil pour la deuxième opération du dos, puis pour votre opération de la vessie. Cela n’a pas été facile, mais vous n’avez pas abandonné.
Bravo pour cette vie bien remplie, vous pouvez être fière de ce que vous laissez derrière vous. Une famille unie et heureuse.
Merci pour tout cet amour et ces belles valeurs que vous avez enseignées à vos enfants, petits-enfants et arrières petits-enfants.
Une page se tourne, à nous de reprendre le flambeau !
Reposez-vous bien et embrassez Michel de notre part, et tous ceux que nous connaissons qui ont dû vous accueillir.
Votre belle-fille, Dominique